« Nous exerçons tous les matins notre odorat à la reconnaissance des odeurs. C’est entraînement pareil à celui des grands sportifs ou des musiciens. S’il peut y avoir au départ une prédisposition, c’est le travail permanent qui forme notre nez. » Charles Kerangoff, Portrait d’entrepreneur à la Parfumerie Guy Delforge, Décembre 2018
La parfumerie Guy Delforge, un laboratoire de senteurs
C’est une galerie, un tunnel vieux de cinq cents ans fait de pierres, qui donne une impression de protection, un cocon. C’est aussi un laboratoire, une caisse de résonance olfactive où se jouent les grandes orgues de la création d’une senteur, d’un sillage. C’est un lieu de repos, celui où les fleurs et les muscs, où les tabacs et bois blonds attendent d’exprimer leurs plus beaux atours. C’est un lieu d’exception, seul endroit en Belgique où se produit l’alchimie olfactive. Ce lieu, c’est la parfumerie Guy Delforge. Une parfumerie pas comme les autres. J’ai eu le plaisir de rencontrer fin décembre un duo étonnant, fait de feu et … de feu, Guy Delforge et Charles Kerangoff. Monsieur Kerangoff m’avait conviée à la visite de la parfumerie Delforge et m’expliquer son enthousiasme à participer à ce magnifique projet de parfumerie. Nous nous sommes donc donné rendez-vous tout en haut de la Citadelle de Namur, aux pieds des casemates et des contreforts de la capitale wallonne.
Dans les galeries souterraines, des senteurs plutôt que des canons
L’endroit est étonnant. Cet ancien laboratoire d’artillerie militaire a délaissé poudres et canons pour une autre arme redoutable, celle du flacon. On y entre et très vite, l’enivrement vient. Des chypres, des roses, du santal… notre nez peu habitué, a cependant l’impression d’un luxe ressenti nulle part ailleurs. Le lieu n’a pas été choisi au hasard : c’est que la parfumerie est directement reliée à un réseau de casemates à la température et l’hygrométrie constante, avantage non négligeable pour l’élaboration des parfums : ces tunnels renferment en effet les grandes touries où macèrent le temps nécessaire, les senteurs qui en feront succomber plus d’un et plus d’une.
De la parfumerie de chez nous
Là, se sont créés et se créent toujours 40 parfums véritables, concentrant presque 15% d’huiles essentielles et de l’alcool (de pulpe de betterave, produit chez nous). Une équipe soudée et passionnée s’est réunie autour de l’artisan parfumeur : si la composition reste un secret bien gardé, chacun participe à la mise en flacon, à l’étiquetage et à la promotion. La parfumerie est une petite usine permanente : ouverte 7 jours sur 7, il faut y accueillir les visiteurs, touristes ou habitués, inconnus ou têtes couronnées mais aussi participer à la mise en place des différentes senteurs dans la salle d’exposition, veiller aux stocks, déterminer les touries à filtrer et à glacer, une fois la macération arrivée à son acmé, répondre aux commandes sur le net (seul point de vente en dehors de la Citadelle) et entretenir le rêve… Charles Kerangoff participe lui aussi en toute conscience à ce retour à l’économie de circuit court, à l’exclusif et au travail bien fait. Il s’est associé en effet à cette aventure il y a maintenant un an et souhaite mettre en avant cette magnifique histoire, la promouvoir comme un fleuron de la création locale. Initiative qui aura bien du succès, on en est persuadés.
Comment tester et conserver un parfum?
Et puisque ici, tout est apprentissage et découverte, l’équipe de Guy Delforge nous explique comment tester et conserver un parfum. Pour découvrir si un parfum vous convient, voici quelques étapes à respecter :
– attendre au moins une à deux min (plus pour les parfums forts) pour laisser s’exprimer pleinement le bouquet ne pas se frotter les poignets : on ne chauffe pas le parfum
– estimer le moment le plus adéquat (être serein et avoir le temps permet d’apprécier au mieux le rendu)
– prendre en considération la saison de l’essai (le rendu sera différent en hiver ou en été)
– tester deux-trois fragrances maximum, le nez n’est pas habitué à sentir davantage en un temps limité
– éviter de parfumer la peau et préférer les vêtements : coton, laine, lin sont des matières très stables qui retiennent mieux les essences.
– parfumer à 30 centimètres (barrer la suite)
Une fois le parfum choisi, prendre garde l’accoutumance ! Il vaut mieux en fonction de ce qui a été dit plus haut
– changer de parfum au fil des saisons
– placer son parfum dans un endroit sec, à l’abri de la lumière et à la température stable : préférer ainsi la chambre à la salle de bains
– conserver son parfum entamé 2 ans maximum (5 à 8 ans non ouvert)